Pitch Black || PV : Frau

La nuit est tombée depuis bien longtemps sur l’entièreté de la bâtisse divine, celle on l’on t’a enfermé depuis bien longtemps déjà. Toi, Slender Klender, aussi connu sous le nom de Kinder III, tu demeures à ce jour le pape le plus jeune de l’histoire entière. Mieux encore, entre tes mains flamboie un pouvoir et une autorité d’une rare puissance. L’ironie du sort, c’est bel et bien que ce soit toi, l’âme la moins libre ici, entres ces murs d’épais ciment. Mais après tout, qui s’en soucie, de ta liberté ? Tu n’es jamais qu’une figure, un emblème, au même titre que tes prédécesseurs. Lorsque tu mourras et rejoindra l’autre monde, là ou t’attends Lucrezia, peut-être que l’on fera attention à toi. Mais là encore, ce ne sera que pour honorer ta mémoire et la tâche qui t’incombait. Rien d’autre ne saurait te rendre visible aux yeux d’autrui. Tu le sais depuis que tu es en mesure de comprendre ce qui se passe autour de toi.

Ça fait mal, de se rendre compte d’une pareille transparence. Mais c’est comme tout, on s’habitue et on repart, encore et encore, telle une hélice n’ayant de cesse de tourner. C’est un cercle sans fin qui ne s’arrêtera probablement jamais d’ailleurs. Il n’y a bien que les pions qui changent, le cours du jeu morbide, quant à lui, reste indissociable de la course de la Lune derrière le Soleil. Fort de ce constat, tu décides d’aller te dégourdir un peu tes jambes ankylosées après la longue marche d’une heure que tu as du faire aujourd’hui pour respecter la pureté de ta fragile unité. C’est par le mal qu’on guérit le mal, parait-il. Du moins, c’est ce que l’on t’as toujours appris depuis que tu es tout petit, alors tu vas obéir aux bonnes vieilles méthodes puisqu’i n’y a que ça de vrai, apparemment.
Laissant ton masque de renard glisser sur le devant de ton visage, tu sors de ta pseudo-cachette, qui n’était autre qu’un creux dans les fondations de l’église ou une gargouille se trouve être manquante. Bien à l’abri derrière un pilier, tu n’étais pas visible aux rayons de l’astre de nuit, joueur et impossible à berner.

Ca ne te ressemble pas vraiment d’être insomniaque à ce point. Voilà bien longtemps que tu n’avais pas fait d’échappée nocturne de cette sorte. Ça t’en rappelle, des souvenirs, et tu ne peux t’empêcher de sourire lors de ces réminiscences. Nul ne voit ton expression presque joyeuse, contrastant avec tes horribles cernes violets, derrière ton masque animal. C’est très bien ainsi. Personne ne doit voir à quel point ton corps est faible ces derniers temps. Tu ignores pourquoi mais la fatigue tu travailles de plus en plus au corps.

Agile et silencieux, tu marches sans faire le moindre bruit, arpentant les couloirs d’une manière absolument aléatoire, à la recherche d’une distraction. Tu ferais presque peur, ainsi, à ne pas permettre que l’on puisse ressentir ton aura tant celle qui émane de toi est faible et imperceptible. Tu cligne des yeux et sursaute. Au loin, tu as entendu des pas. Ils sont puissants et rythmés. Tu ne peux t’empêcher d’éprouver une certaine curiosité soudaine. Alors, tu te diriges vers l’épicentre de cette mélopée. Nous verrons bien ce que ton excursion nocturne va donner.

Spoiler:

Tu ne voulais faire de mal à personne, Slender. Juste t’amuser un peu pour te divertir du peu de choses que tu es en charge de faire ces temps-ci. Ton but n’était en rien de causer du tort à qui que ce soit, et surtout pas à l’un des évêques de cette église. Ils te sont précieux, tous autant qu’ils sont. Tu voudrais les protéger, mais tu n’arrives déjà pas à te protéger toi-même, alors autant dire que tu ne sers pas à grand-chose, au final. Curieux, tu t’avances, toujours plus silencieusement, jusqu’à entendre la voix familière du serviteur de Dieu le plus pervers qui soit, Frau en personne. Tu rirais presque, si tu n’avais pas tant mal à la gorge. Mais la grippe qui t’es passée dessus il y a trois semaines a laissé encore quelques traces de son passage, alors tu demeures silencieux, comme toujours.

Ton étrange masque sur le visage, tu scrute ses faits et gestes, te gardent bien d’intervenir. Va-t-il finir par te voir, là, juste dans son dos ? Rien n’est moins sûr. Après tout, tu es chétif, petit et par-dessus tout, frêle comme une brindille, prompt à te briser à la moindre brise trop téméraire te frôlant. Mais ceci n’est autre que le prix à payer pour les capacités que Dieu t’a donné à la naissance, Slender. Tu ne t’en rends peut-être pas bien compte, mais tes larmes de sang sont le tribut que tu versas avant même tes premiers cris pour pouvoir discerner lucidement les présences des 07-ghost, à l’inverse des populations lambda qui elles, ne voient rien, aveuglés par l’harmonie falsifiée des choses qui les entourent. Tout, tu es différent. Et c’est bien pour cela que tu mourras vite. La vie n’aime pas les différences trop marquées et cherche inéluctablement à s’en débarrasser le plus vite possible. Là, entre autre, c’est de toi dont il s’agit.

Tu penches la tête sur le côté. Tu es donc si invisible que cela pour qu’il ne se retourne pas ? Ton cœur se serre mais tu n’y prête pas attention, tu as l’habitude maintenant. Et puis tu ne vas pas lui en vouloir, après tout. Lui, au moins, il est quelqu’un. Il existe aux yeux des autres. Il respire la vie, contrairement à toi qui ne souffle que du froid, telle la Faucheuse qui viendra un jour sonné fièrement ton glas. Tiens, d’ailleurs, parlons-en, du froid. Tes pieds nus caressent le ciment formant le sol de l’église tandis que tu continues de suivre Frau. Il fait froid, ce soir ? Ou bien est-ce toi qui fabule, pour ne pas changer ?

Immanquablement, tu finiras de nouveau malade de cette escapade nocturne, cloué au lit par une forte fièvre. C’est certain. Mais tu ne regrettes pas. D’ici trois semaines tu iras mieux, normalement. Alors tu continu ton petit jeu qui va finir par mal tourné si tu persiste à vouloir te faire reconnaître par ces gens qui ne sont même pas tes pairs. Car tu es bien trop différent d’eux tous, Slender.

Tu te doutais bien que tu finirais par lui faire peur, espèce d’idiot. Toutefois, s’il y avait bien une chose que tu n’avais pas prévu dans tes fort peu savants calculs, c’était que Frau revêtirait sa forme de Zehél pour essayer de débusquer la petite souris qui le turlupinait depuis un bon bout de temps maintenant. En l’occurrence, toi. Tu es resté de marbre face au coup de faux que tu manquas de peu de te recevoir. C’est vrai, il aurait suffi que tu fasses une petite chute de tension pour que la lame de l’arme glisse délicatement sur sa gorge, de tranchant la tête. Fort heureusement, rien de tout ça ne se produisit, le Seigneur devait probablement être de ton côté et aidé ton corps faible à tenir le coup, oui. C’était très certainement ça. Inutile de se poser davantage de question ça n’aurait servi à rien après tout.

Malgré tout, ton masque, lui, ne supporta pas cette proximité avec un Ghost et plia bagages pour mieux te laisser seul face à l’adversité. Il tomba sur le sol, dans un cliquetis distinct. Peu importe, tu écarquillas un instant les yeux en voyant Zehél le magnifique devant toi. Cela faisait bien longtemps que tu ne l’avais pas vu de tes propres yeux, tu es heureux, bien que tu ne saurais expliquer pourquoi. Qu’importe, tu le regarde s’éloigner tandis qu’un fin sourire vient ourler tes lèvres si fines. Tu penses que tu n’aurais peut-être pas dû faire une chose pareille. Il n’était pas très intelligent d’agir de la sorte, il est vrai, mais toi tu n’avais guère fait cela par méchanceté ou pour effrayer qui que ce soit.
Mais franchement qui peut bien avoir quelque chose à faire de tes envies ou de tes objectifs ? Tu es né pour mourir, au-delà de ça, ton rôle et des caprices importent peu. C’est bien pour ça que tu ne te livre jamais à de telles choses d’ailleurs, tu sais pertinemment que ça ne te mènerais à rien. Et enfoncer une porte ouverte n’a jamais été dans tes cordes et encore moins dans tes objectifs.

Mais tu veux revoir un petit peu Zehél, avant de retourner dans ta chambre. Il ne fait pas très froid, mais malgré tout tu te sens frigorifié de part en part. Ta constitution, encore. C’est toujours de sa faute à elle, de toute manière. Ce n’est pas grave, tu prends sur toi, ce n’est pas la mort. Pas encore du moins. Aussi, tu ramasse ton masque, lentement et tu commences à suivre un chemin aléatoire, que tu soupçonne d’avoir été emprunté peu de temps avant par l’un des serviteurs de ton plus proche frère divin. Et enfin, essoufflé après seulement une demi-minute de marche rapide, tu tombes sur Frau, qui… fume. Il suffit, tu pourrais lui faire la morale, mais tu es trop fatigué pour cela. Peut-être par la suite, lorsque tu auras recouvré tes forces. Pour l’instant, tu lui parle seulement, le plus gentiment du monde.

« Bonsoir Zehél, navré de … de t’avoir effrayé… mon ami... »

Oui, car chacune des âmes ici présentes est ton amie, c’est de cette manière que tu vois le monde. Et tu n’as pas vraiment envie que ça change, pour l’instant.